Roméo, notre petit garçon de cinq ans, ne veut pas embrasser sa grand-mère. Le pédiatre nous assure qu’il ne faut pas le forcer. Mais ma belle-mère, de nature peu accueillante, en profite pour compliquer un relationnel avec moi. Relationnel qu’elle a rendu difficile dès notre première rencontre, lorsque je lui ai été présentée par son fils comme étant sa future belle-fille. Mon mari réagit mal à la situation : il peut être très sévère avec Roméo lorsque celui-ci refuse de dire bonjour à sa grand-mère, pour finir par s’en prendre à moi. De fait, nous nous disputons beaucoup. Que me conseillez-vous ?

Iris B. - 19200 Ussel

La réponse du psychanalyste

Tout d’abord, votre pédiatre a tout à fait raison car Roméo peut aussi avoir ses raisons inconscientes et conscientes que nos règles de civilités ignorent… D’autant que selon les travaux freudiens, Roméo, entre – compte tenu de son âge – dans ce que la psychanalyse nomme période de latence : cette phase existe jusqu’à la puberté, durant laquelle Roméo, comme tous les enfants de son âge, va transformer quelque peu ses impulsions affectives pour les convertir puis les diriger vers des activités plus sociales ; les copains d’école prennent une place plus grande, les activités sportives choisies ouvrent de façon plus large un esprit de partage au sein de groupes… L’enfant commence à réaliser ainsi comment fonctionne une collectivité dans laquelle les règles sont bien difficiles. En outre, psychanalytiquement parlant, l’attitude de votre petit garçon est plutôt rassurante et traduit déjà une bonne évolution psychique, révélatrice d’un fonctionnement logique de son monde intérieur. Il est légitime, par ailleurs, de ne pas laisser Roméo s’installer dans un comportement d’opposition qui finit par le rendre désagréable, détestable aux yeux des autres, mal élevé, autant d’éléments qui ne peuvent que le culpabiliser in fine. L’hypothèse que je peux émettre et qui pourrait expliquer le refus de Roméo à vouloir embrasser sa grand-mère consiste à imaginer que vous avez pu parler devant lui, à plusieurs reprises, de façon très négative de votre belle-mère ou faire des reproches à votre mari concernant les relations qu’il entretient avec sa mère et un certain parti pris. Roméo a pu vous sentir en difficulté face à ce type de situation et cherche à vous défendre avec ses petits moyens en montrant ouvertement quel camp il a choisi ! De facto et vous l’avez compris, il faut creuser dans cette direction, observer vos réactions lorsque vous vous trouvez en présence de votre belle-mère, être attentive aux commentaires ou aux jugements que vous pouvez développer à son encontre. Toutes les pistes aboutiront, j’en suis certaine, à vous faire comprendre que si un partenaire a du mal à nous accueillir et à nous reconnaître, c’est qu’il est lui-même englué dans une souffrance qu’il exprime par du rejet dirigé contre un bouc émissaire. Essayez d’ores et déjà de dialoguer avec la mère de votre mari. Demandez-lui de vous parler de son enfance, de ses parents, de sa fratrie si elle en a une et puis aussi de ses cinq-six ans : quelle petite fille était-elle à l’âge de Roméo, que se passait-il dans sa famille, dans sa vie, dans la société de l’époque ?… Vous verrez que vos échanges deviendront passionnants et vous comprendrez alors beaucoup des mécanismes de défense de cette dame qui cache certainement un très gros coeur, puisque vous avez quand même pris le temps de m’écrire pour me parler d’elle ! Vous constaterez, un jour, que vous avez trouvé en elle une amie intéressante et précieuse. Mais alors, attendez-vous à quelques petites réactions de jalousie de la part de votre mari et de Roméo !