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A lire : les livres et quelques articles
de Chantal Calatayud,
psychanalyste, didacticienne analytique,
auteur,
parus dans Psychanalyse magazine.

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« Mon mari veut une fille... »


Il y a sept ans qu’est né Victor, notre petit garçon, alors que Jean-Yves et moi n’étions pas mariés. Deux ans après la naissance de notre fils, nous avons donné une grande fête à l’occasion de notre mariage. Depuis, mon mari n’a de cesse de vouloir une fille mais je n’ai aucune envie de redémarrer une maternité. Notre couple se fissure de plus en plus ; mon mari devient même suspicieux au point d’imaginer que mon patron est mon amant…

Louise V. – 21640 Vougeot

La réponse du psychanalyste

La question implicite que vous soulevez est, en fait, « que cache la demande d’un second enfant pour votre mari ? », d’autant que vous voulez coûte que coûte que « cette » enfant à venir vous enferme dans une espèce de piège que deviendrait soudain la maternité ! Victor a donc été conçu hors mariage et votre courrier donne un éclairage intéressant. Effectivement, vous associez de façon négative, inconsciemment, mariage légitime, donc union légale et maternité. Ainsi vos propos permettent-ils de penser que la grossesse liée à la venue de votre fils s’est apparentée à la possibilité de faire un bébé toute seule, ceci dans le fantasme évidemment ! Toujours est-il que, sans vous en rendre compte, vous devez avoir une propension à écarter le père de son enfant et la relation triangulaire a du mal à se mettre en place, telle qu’elle devrait l’être. Il est grand temps de réagir compte tenu de l’âge de votre fils qui aurait dû depuis longtemps déjà développer une relation précise et précieuse avec son père ! Ma réponse peut vous étonner mais le fait que votre époux insiste sur le désir d’avoir une fille (et non un enfant, ce qui serait plus logique) renseigne déjà sur vos attitudes supposées quant à votre mari. Le moment est venu de lui faire comprendre que l’arrivée de votre petit garçon n’a en rien entaché vos rapports amoureux ; il faut impérativement, et ce le plus vite possible, que vous sortiez de cette confusion car sinon le risque serait grand et consisterait à laisser fantasmer votre enfant sur le fait qu’il est marié avec maman ! À sept ans, Victor devrait déjà avoir résolu sa première phase oedipienne car il faut que vous ayez conscience que si vous ne lui permettez pas d’avoir accès à son père comme il se doit, vous prenez, là aussi, le risque de perturber par la suite, à l’âge adulte, et sa propre vie affective et sa propre vie sociale. Il apparaît utile d’observer et de repérer vos comportements lorsque vous êtes en présence du père et du fils, ce qui vous donnera de quoi rétablir une situation qui, manifestement, vous conduit à la dérive, voire au divorce. D’ailleurs, implicitement, les propos de votre mari vous menacent discrètement (quoique !) d’une séparation ; il ne faut jamais prendre à la légère les paroles d’un partenaire, a fortiori en période de crise ; or, cet homme ne revendique-t-il pas, à sa façon, certes au sens figuré, « une fille » ? Et ce d’autant plus que vous signalez ce qui pourrait s’assimiler à une projection de sa part lorsqu’il imagine que vous avez une liaison avec votre employeur… Ainsi, l’amour d’une mère pour son fils ne peut en aucun cas se confondre avec l’amour d’une femme pour un homme. Et même si cela apparaît comme une évidence, encore une fois, certains partis pris, certains agissements vis-à-vis de l’enfant, en présence du père ou relatés à celui-ci, peuvent suffire à entraîner chez votre mari un sentiment d’exclusion. Bien des maladresses relationnelles sont la cause de désaccords de couple qui peuvent être masqués par des demandes en fait compensatoires, sorte de S.O.S. qu’il faut absolument décrypter. Dans votre cas, une fois votre relation de couple rééquilibrée dans le sens d’un discernement objectif fait par vous-même entre le rôle de mère et celui d’épouse, vous pourrez certainement envisager sereinement une seconde maternité, sans y mêler, malgré vous, une notion de rivalité inconsciente. Une fois de plus, force est de constater combien il s’avère important de respecter sa place et celle de l’autre, quel qu’il soit…

 

 

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