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A lire : les livres et quelques articles
de Chantal Calatayud,
psychanalyste, didacticienne analytique,
auteur,
parus dans Psychanalyse magazine.

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« Suis-je anormale ? »


Âgée de vingt ans, je n’ai jamais connu le moindre flirt. Les statistiques et divers sondages publiés dans une certaine presse ne sont pas faits pour me rassurer. À votre avis, suis-je anormale ?

Candy M. - 23000 Guéret

La réponse du psychanalyste

Dans le corpus que constitue l’humanité s’expriment bien des différences et c’est heureux. Ainsi, que vous ayez envie de rencontrer l’amour apparaît justement… normal. Mais, par contre, fuyez statistiques et sondages, dans ce domaine, qui peuvent constituer le pire des pièges. Votre encore très jeune âge permet d’aborder ce que vous vivez comme un problème de façon plus détendue que l’idée inconsciente et/ou consciente que vous vous faites de la sexualité. Car s’il y a résistance, c’est bien à cet endroit-là que ça « coince », que ça « achoppe », d’autant, qu’a priori, vous ne signalez aucun handicap physique apparent qui pourrait aller dans le sens d’une justification et d’une démonstration de votre blocage. Sans entrer dans une théorisation trop complexe et de fait inutile, on peut envisager plusieurs raisons à cette impossibilité, à ce jour, de mettre en place une situation somme toute constitutive de l’être humain. Il est certain que si, dans votre vie psychique, évoluent des angoisses liées à un schéma déformé de la relation amoureuse, donc de la relation de couple, l’énergie utilisée à entretenir cette angoisse, comme des herses au service d’un non-passage à l’acte, sera manquante ou insuffisante pour voir, dans une soirée, le jeune homme que vous séduisez sans vous en rendre compte et qui pourrait vous convenir. D’une autre façon, si l’image du couple retenue par votre inconscient est une image négative, conflictuelle ou stérile ou si la sexualité est « tabouisée », rien ne peut se passer. Par ailleurs, il peut suffire que la maternité ait été fantasmée synonyme de danger ou engendrant une obligation d’être une bonne mère (mais qu’est-ce qu’une bonne mère ?), pour que vous évitiez, à votre insu, toute rencontre amoureuse. Bien des facteurs peuvent donc entrer en ligne : tout schéma de perfection, d’idéalisation, avec une crainte de ne pas être à la hauteur, contribuent à la difficulté que vous rencontrez actuellement. Se surajoute parfois une fausse-couche ou le décès d’un enfant dans la filiation et, outre des éléments de culpabilité liés à une dette inconsciente et fantasmée, le risque identificatoire apparaît trop important pour mettre en place une relation de couple qui, dans une logique des choses, annonce la venue au monde d’un enfant. Plus rares, quoique de plus en plus courantes, des attitudes que l’on peut attribuer à une certaine forme de paraître font que la jeune femme redoute de perdre une quelconque maîtrise de son corps qu’elle a peur de retrouver déformé après une naissance. D’autre part, si l’image du couple se trouve associée à la trahison, soit que le couple parental ait divorcé et que le divorce ait été mal vécu par l’enfant, soit que des disputes violentes aient traumatisé et perturbé gravement la petite enfance, l’inconscient « interdira » toute rencontre amoureuse… Cependant, il ne s’agit là que de possibilités alors que chaque obstacle, chaque échec, chaque processus d’inhibition plonge ses racines dans un magma unique, le sien, car chaque existence est effectivement une et il n’est pas question ici de développer des généralités. Je vous donne ces quelques indications simples afin que vous puissiez y réfléchir et je suis certaine que vous pourrez ainsi déjà repérer où le bât blesse…

 

 

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