chantal_calatayud

A lire : les livres et quelques articles
de Chantal Calatayud,
psychanalyste, didacticienne analytique,
auteur,
parus dans Psychanalyse magazine.

ouvrages-publications-chantal-calatayud-directrice-institut-psychanalyse-ifpa

 

Exercice illégal de la médecine
ou exercice illégal de la psychanalyse ?



En 1951, Miss Williams, psychanalyste non-médecin, est poursuivie en correctionnelle par le Conseil de l’Ordre des Médecins pour « exercice illégal de la médecine »... Pourtant, Sigmund Freud, bien que médecin de formation, n’avait-il pas écrit : Il faut considérer que le médecin reçoit dans les facultés une instruction qui est à peu près le contraire de ce qu’il faudrait comme préparation à la psychanalyse ! Il y eut même perquisition chez Miss William qui avait essayé d’échapper à la « Loi » en se cachant sous le pseudonyme de Miss Clark. Son plan échoua et deux inspecteurs de l’époque, qui avaient trouvé dans son bureau « des dessins si spéciaux », ont consigné dans leur rapport qu’elle pratiquait la magie. En fait, elle gardait simplement les dessins d’enfants qu’elle analysait ! Elle s’en expliqua : Ces tests sont autant de symboles trahissant le choc émotif qui rend un enfant instable…
Ancienne élève de Lagache, psychanalyste français et psychiatre, elle obtenait d’excellents résultats avec les enfants, tout comme une autre psychanalyste fort connue, bien que non médecin, Melanie Klein. Anna Freud, la fille de Sigmund Freud, reçue à Paris en 1950 et félicitée pour ses travaux, n’était pas plus Docteur en Médecine. Lors de la réception organisée en son honneur par le Congrès de la Psychanalyse, le docteur Logre, médecin légiste et expert près les tribunaux, lança : Si Anna Freud avait pratiqué la psychanalyse en France, il lui aurait fallu prendre garde qu’un agent de police ne l’emmène chez le juge d’instruction ! Le docteur Logre insista dans la foulée sur le fait que les pratiques médicales étatisées et celles de Freud, non reconnues officiellement, représentaient la concavité et la convexité d’une même courbe. Mais bien d’autres médecins de l’époque étaient d’opinion contraire. La polémique, quelques soixante années plus tard, existe toujours et s’installe même de plus belle puisque l’enseignement de la psychanalyse sur les bancs de la Faculté progresse. Il faudrait demander aux universitaires chargés de ces cours comment ils permettent à leurs élèves d’étudier, entre autres, le transfert. Car c’est bien cette notion de transfert qui a conduit Ferenczi, psychanalyste et psychiatre, à imposer le principe de la didactique de groupe, alors que Jung est à l’origine de la didactique individuelle. Celui-ci insistait sur la nécessité de traiter les élèves comme des patients… Et ainsi, si certains courants médicaux et psychologiques persistent à vouloir limiter l’enseignement de la psychanalyse à un enseignement théorique, n’assisterons-nous pas peu à peu à un exercice illégal de la psychanalyse ? D’autant que comme l’énoncent Élisabeth Roudinesco et Michel Plon dans leur ouvrage « Le dictionnaire de la psychanalyse », la psychanalyse a en quelque sorte effacé la frontière traditionnelle entre le savoir et la vérité…

 

> Lire d'autres articles