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A lire : les livres et quelques articles
de Chantal Calatayud,
psychanalyste, didacticienne analytique,
auteur,
parus dans Psychanalyse magazine.

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La durée des séances freudiennes en questions

 
 


Chantal Calatayud, psychanalyste, fondatrice et directrice de l’Institut Français de Psychanalyse Appliquée, publie un ouvrage didactique au titre étonnant, « 55 minutes avec Freud ». Elle nous explique pourquoi…

Psy Magazine : Compte tenu de votre âge, il n’est pas possible que vous ayez passé 55 minutes avec Freud !
Chantal Calatayud :
C’est une évidence !

P. M. : Mais alors, pourquoi ce titre « 55 minutes avec Freud » ?
C. C. :
Tout simplement parce que Freud recevait et gardait ses patients 55 minutes…

P. M. : Autrement dit, une séance de psychanalyse freudienne dure 55 minutes…
C. C. :
Tout à fait.

P. M. : Comment se fait-il alors que l’on entende que des psychanalystes, qui se disent freudiens, gardent leurs patients 45 minutes ?
C. C. :
Il y a deux raisons à cela. Tout d’abord, tout psychanalyste est freudien dans la mesure où l’enseignement psychanalytique repose fondamentalement sur les postulats de Sigmund Freud. Ensuite, le psychanalyste s’autorise de lui-même dans sa pratique, comme disait Jacques Lacan et certes de quelques autres ajoutait-il…

P. M. : Votre réponse semble un peu complaisante tout de même car si l’on considère qu’il y a une règle – a fortiori en psychanalyse –, elle se doit d’être appliquée et donc respectée…
C. C. :
Je ne suis en aucun cas complaisante. Loin de là même. Je veux juste induire ici que dès l’instant où on exerce cette profession, ce métier surtout, si singulier, qu’est la psychanalyse, on peut y gagner quelques convictions qui se sont imposées à soi. D’autant que Freud nous a laissé en héritage une phrase essentielle qui traduit très bien la pensée de cet homme libre : Je vous laisse un rail, a-t-il dit, ensuite empruntez-le comme vous voudrez…

P. M. : Quelle responsabilité !
C. C. :
Oh oui ! Mais cette liberté est nécessaire à l’évolution de la psychanalyse qui est encore une « jeune fille » puisqu’elle n’a guère plus de cent ans !

P. M. : Compte tenu du titre de votre ouvrage, vous devez quand même bien avoir une petite idée personnelle de ce temps – 55 minutes – que certains s’octroient à leur guise ? D’autant que, dans ce même ouvrage, vous semblez dubitative quant à la modification de la durée des séances chez ceux qui se disent freudiens ?
C. C. :
Je comprends votre insistance… Et je vais essayer de faire le distinguo entre mon livre qui est davantage didactique et s’adresse essentiellement à de futurs psychanalystes ou à de jeunes analystes qu’à un public non averti, et une interview comme celle que vous avez la gentillesse de m’accorder. À titre personnel, effectivement, je ne suis pas favorable à la modification de ce temps horaire par certains de mes confrères, c’est-à-dire ceux qui assurent à leurs patients qu’ils vont faire une véritable cure freudienne. En revanche, pour vos lecteurs, je peux leur transmettre – pour clarifier ce débat et s’ils sont à la recherche d’un psychanalyste – que peu importe ce que l’on fait au niveau de la durée, si on sait pourquoi on le fait…

P. M. : C’est quoi qu’il en soit la porte ouverte à tout…
C. C. :
Non, je ne suis pas d’accord avec ça. En vous faisant cette réponse, je m’appuie sur une phrase de Jean-David Nasio, psychanalyste, qui écrit dans un de ses ouvrages : Peu importe ce que l’on dit si on sait ce que l’on fait – en cure analytique bien entendu.

P. M. : On sent dans vos propos un réel désir de liberté mais vous, comment travaillez-vous ? 55 minutes ou pas ?
C. C. :
Je travaille de façon lacanienne quant à la durée des séances. À savoir, des séances à durée variable en fonction du rythme que l’inconscient de l’analysant définit dans le transfert. Ce temps est sanctionné par une ambivalence langagière produite par le patient à un moment précis de la séance et que Jacques Lacan a appelée scansion.

P. M. : Si vous le voulez bien, ce sera peut-être l’objet d’une prochaine interview… (rires)
C. C. :
D’autant, effectivement, que je pourrais analytiquement parlant vous scansionner sur le terme « objet » mais vous n’êtes pas sur le divan… (rires)…


Propos recueillis par Le docteur Laurence Pescay

Interview accordée à Psy Magazine en Janvier 2011

 

*À lire :
« 55 minutes avec Freud »,
Chantal Calatayud,
Éditions Villon

 

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