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A lire : les livres et quelques articles
de Chantal Calatayud,
psychanalyste, didacticienne analytique,
auteur,
parus dans Psychanalyse magazine.

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Réussir son couple,
c'est possible !


Envie de mariage ? Voilà un grand projet plein de jolies promesses et de vrais bonheurs... Mais pour qu’amour rime avec toujours, encore faut-il que cette alliance d’un registre unique s’établisse au nom du désir.

Il n’est d’ailleurs pas très aisé de comprendre pourquoi 9 % environ des femmes en occident choisissent de vivre célibataires, alors que le reste de la planète n’abrite qu’1 % du sexe dit faible ne convolant pas en justes noces. On constate aussi que l’Afrique marie très tôt ses jeunes filles, alors que la France voit ses étudiantes choisir de plus en plus la fin des études supérieures pour passer devant Monsieur le Maire. Même constat pour le Japon. Et contrairement aux idées reçues, les hommes traînent davantage les pieds pour prendre épouse, bien que ceux-ci aient tendance à le faire plus tôt qu’au tout début du XXème siècle. Mais alors, pourquoi se marie-t-on aujourd’hui ?
Si certains parlent d’un héritage culturel solidement ancré, d’autres assurent qu’il s’agit d’une réalité économique : l’union faisant la force, les loyers ne cessant d’augmenter tandis que les salaires stagnent, le mariage peut prendre des allures déguisées d’avantage social ! De quoi dépoétiser une institution séculaire. Quoi qu’il en soit, le nombre de divorces n’étant pas à la baisse, il est difficile de faire l’impasse sur une « angoisse automatique » face à un engagement pas comme les autres. Cependant, bien se marier reste le plus grand des possibles, à la condition toutefois de comprendre que vivre en couple nécessite, entre autres, petites frustrations et grandes concessions... Le plus efficace consiste essentiellement à éviter certains pièges. Bien se marier et le rester revient avant tout à privilégier l’écoute du partenaire afin d’identifier ses demandes. Seule cette communication permet de regarder dans la même direction. Il s’agit-là d’un apprentissage élémentaire : celui de la mise en place du oui, acceptation mature d’une rencontre d’un autre genre. L’humanité et sa bonne marche en dépendent. L’institution matrimoniale a la grande responsabilité d’être la matrice privilégiée de la famille et de son équilibre. Et si le mariage se décline tour à tour en termes de droits et de devoirs, à nous d’être suffisamment adultes pour ne pas rechercher dans cet acte citoyen une sécurité qui se voudrait un bouclier pour la vie. Autrement dit, le conjoint ne doit pas avoir valeur de prothèse. Mais pour ne pas béquiller son couple, encore faut-il bannir des buts inconscients redoutables. La magie du mariage se passe de stratégies. Car, comme le précisent clairement Jean-Jacques Crèvecœur et Ananon Thiran dans leur ouvrage « Le couple en éveil » (Éditions Jouvence), la vie de couple est un moyen d’évolution individuelle. Dès lors, trois points primordiaux sont à respecter pour que le mariage en tant que longue lune de miel ne se transforme en une interminable lune de fiel :
> Accueillez la parole du conjoint comme un contenu positif, même si la forme semble déplaisante
Plutôt que s’arrêter à ses reproches, à ses plaintes, il convient de ne pas développer d’attitudes aux allures de paranoïa. Quand votre partenaire projette sur vous ses propres conflits intérieurs, désamorcez-les tout de suite en comprenant qu’à ce moment-là, vous servez de bouc émissaire... privilégié ! Vous êtes identifié(e) comme pouvant supporter et résoudre une problématique, tout étrangère soit-elle à vous. Voilà manifesté de quoi vous « renarcissiser ». De fait, les mécanismes de défense chutent et le dialogue à type de véritable échange s’ouvre.
> Exposez vos doutes sans retenue pour ne pas rivaliser
Laisser ses failles accessibles à son partenaire humanise la relation quotidienne. Pas question ici de rapport dominant-dominé. Exprimer ses incertitudes, ses limites, permet à l’énergie du couple de circuler librement de l’un à l’autre sans rivaliser. Trop de couples, sans s’en rendre compte, progressivement, modifient leur relation en une sorte de compétition à peine dissimulée. Monsieur fait du body-building à outrance tandis que Madame s’épuise en randonnées ; l’époux apprend le japonais pendant que l’épouse suit des cours d’anglais. À table, il n’est alors question que de performances, sans être d’aucune façon attentif aux progrès de l’autre. À l’inverse, dire ses difficultés à faire du bénévolat alors que le partenaire s’est remis joyeusement au piano permet de faire équipe. La vraie communication ne peut s’établir qu’à la faveur d’un discours qui permet de faire régulièrement le point. De fait, chacun s’autorisera non pas à échouer mais à souffler un peu quand le besoin s’en fera sentir. Savoir baisser les bras à certaines périodes de l’existence permet justement à son conjoint... d’exister, tout en s’offrant le temps d’authentifier son évolution et sa belle avancée.
> Acceptez de vous adapter aux limites de votre partenaire
Il n’y a pas de couple qui dure sans cette adaptation à la réalité. D’autant qu’il n’existe là aucun risque de complaisance vis-à-vis du conjoint dans la mesure où toute limite se repousse, à la condition, bien entendu, d’accepter le rythme de cet autre. Y parvenir ne relève pas d’un défi inaccessible. Il s’agit simplement de tester la capacité ou l’incapacité momentanée de votre partenaire en lui livrant vos propres envies. Sa réaction émotionnelle sera un baromètre fiable indiquant jusqu’où vous pouvez aller. Plus qu’un guide, ce miroir vous en dira long sur la qualité de votre relation à l’instant « t ». Vous pourrez ainsi rectifier ce qui ne convient pas. Cette réflexion dénouera peu à peu les nœuds noués maladroitement en amont. Ce recentrage sur soi passe soudain par un état silencieux, salvateur pour l’autre élément du couple. L’information que vous recevez alors devient un outil précieux pour comprendre en quoi vous pouvez aider votre conjoint à monter une marche bénéfique pour les... deux. De cette relation vivante se joue la qualité du lien qui ne peut se remplacer qu’à la faveur de l’acceptation de la différence. Et c’est ainsi que bien vivre ensemble impulse à trouver la juste distance entre l’autre et soi mais à la condition, toutefois, de la redéfinir régulièrement. Entre les schèmes identificatoires filiaux, chers à Freud, par fantasmes interposés, et la difficulté à quitter cette fidélité et cette loyauté familiales, se situe malgré tout la seule aventure qui mérite que l’on rappelle qu’aucune expérience conjugale ne peut véritablement servir d’exemple à quiconque. Élaborer et construire son couple échappe le plus souvent à toute logique. En somme, une bien belle occasion de faire du mariage la plus longue expérience de sa vie...

 

 

 

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