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A lire : les livres et quelques articles
de Chantal Calatayud,
psychanalyste, didacticienne analytique,
auteur,
parus dans Psychanalyse magazine.

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Découvrez gratuitement ici
la version en ligne du livre de Chantal Calatayud

" Les secrets de la longévité d'un couple "

Editions Villon
Collection " Vivre heureux tout simplement... "

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Les couples qui durent existent et sont même légion…
Qui sont-ils donc ces heureux élus qui traversent leur existence sans rien vouloir montrer d’exceptionnel dans leurs attitudes amoureuses ? Qui sont-ils donc encore ces individus en voie de disparition qui s’aiment depuis plusieurs décennies ? Qui sont-ils aussi tous ceux qui, après être passés devant Monsieur le Maire – ou pas –, ont pu finir par faire de leur quotidien à deux une sorte d’évidence banale déroutante : celle qui déclenche chez bien des exclus de ce registre incontestable d’une forme de bonheur enviable le désir d’y accéder ?
Cet ouvrage répond clairement à ces questions en utilisant des situations conjugales concrètes. Ici, le fil conducteur ne fait jamais l’impasse sur le fait que le plaisir à vivre à deux existe en son principe à deux conditions : d’une part de façon manifeste (bonne humeur, drôlerie, humour, joie), d’autre part de façon muette (paix, stabilité, équilibre). Les couples heureux dans le temps le savent et invitent à faire comme eux...

     

Chapitre VI

Revisiter humeurs et prises de tête

Tous les sondages sont unanimes : le souhait premier pour chacun d’entre nous, c’est d’atteindre la paix. De vivre paisiblement. Or, lorsque nous avons le courage de nous observer un tant soit peu, nous constatons plutôt l’inverse ! Faut-il rappeler que nous avons l’art de rejeter sur notre interlocuteur la responsabilité de tout état de crise ? Projection pas très honnête, constaterez-vous. Pire que cela même puisque la paix repose sagement en nous, disponible… Que se passe-t-il donc pour que nous générions naturellement du conflit (trop facilement) ? La réponse tient à un détail, ce qui est encore plus regrettable : la paix a ses lois que nous nous appliquons à ignorer !

À l’origine de tout désaccord, on retrouve la victimisation. Certes, à force de se dire ou de clamer à haute et intelligible voix que mon homme ne me comprend pas, que ma femme me délaisse, que c’est toujours lui qui fait des histoires, qu’elle rouspète dès que je m’installe devant un match de foot télévisé…, à force de nourrir, d’alimenter, d’entretenir des idées négatives – sur fond de procès d’intention – adressées à notre partenaire, on récolte la tempête ! Les larmes viennent clore le débat un temps. La ronde infernale de la répétition s’enclenche. L’amertume couronne le tout, l’épuisement prenant pernicieusement des allures de fin de combat… La trêve n’en sera que plus factice et, en règle générale, de courte durée ! Rien que d’imaginer ce plan récurrent, hautement dévalorisant, on est vidé. De toute façon, un couple cohérent ne s’acharne pas de la sorte, même si chacun a son caractère.

Afin de découvrir comment s’y prennent les partenaires affectifs équilibrés pour alléger leur relationnel, je vous suggère quelques travaux pratiques simples. Ils ponctueront régulièrement ce chapitre. Des prises de conscience faciles et utiles s’imposeront à vous au fur et à mesure du développement de suggestions porteuses et génératrices de relaxation psychologique.

Travaux pratiques n° 1 : À vos calculettes !

  • Au cours des heures passées, vous avez critiqué, ouvertement ou en pensée, votre aimé. Combien de fois ? C’est édifiant non ?

Imaginons maintenant que vous appreniez subitement que l’élu(e) de votre cœur vienne d’avoir un très grave accident. Immédiatement, dans l’instant, à la seconde, vous stopperiez toute rancœur dirigée l’heure précédente contre lui (contre elle). Reconnaissez qu’il est quand même dommage que ce genre de situation dramatique soit là pour éprouver à nouveau des bouffées d’amour dénuées de tout ressentiment…

Vous avez donc le mode d’emploi pour que cesse, de façon anticipatoire, le moindre reproche dirigé, telle une analyse sauvage, contre celui ou celle que vous aimez… « mal » ! Sans compter que le scénario peut se révéler plus tragique encore : combien d’analysants, d’amis, de membres de notre famille, de relations, ne nous ont-elles pas confié un jour leur immense chagrin, leur douloureux regret après un décès : ils assurent tous ne pas avoir assez du reste de leurs jours pour expier…

· C’est Maryse qui nous prévient et nous met en garde à sa façon :

– Mon beau-frère avait deux fils. Il se montrait très exigeant avec eux. Trop autoritaire, il ne supportait pas que ses deux garçons n’aident pas à la maison. Petits, ceux-ci « s’exécutaient » sans le moindre refus. Le temps a passé. Ils ont grandi. L’aîné obtempérait toujours. Le plus jeune se révélait plus rebelle, plus insoumis. Celui-ci s’est particulièrement révolté vers l’âge de 14 ans. S’il acceptait de débarrasser la table en période de vacances scolaires, il disait à son père qu’il n’avait pas suffisamment de répit à l’heure du déjeuner pour donner ce coup de main. Il ajouta un triste jour de décembre que sa mère ne travaillant pas, elle pouvait débarrasser le couvert… Son père lui asséna une gifle magistrale. L’ado prit son sac à dos, partit en claquant la porte, traversa la rue sans regarder et se fit écraser par une voiture dont le conducteur n’a pas pu réagir… Mon beau frère ne s’est jamais remis du décès de son enfant tué sur le coup. Le couple s’est naturellement reproché l’origine de l’accident et a fini par divorcer…

Cet homme était militaire de carrière. Tout récemment à la retraite, il confondait le commandement (de troupes, d’appelés) avec l’éducation (parentale) qui nécessite le dialogue. Il n’arrivait pas à s’adapter à ses enfants qui, selon Maryse, ne satisfaisaient jamais ce père, quoi qu’ils fassent.

On se doute que ce si couple s’est séparé, la séparation couvait sûrement depuis longtemps. La mort du jeune homme n’a été qu’un pénible révélateur des exigences d’un mari communiquant insuffisamment avec son épouse. Il est certain que regardée à la hâte, cette famille sentait bon l’ordre. Cependant, on imagine aisément que même la mère des enfants n’avait pas voix au chapitre…

Travaux pratiques n° 2 : Revisitez vos humeurs !

  • Dans quelles circonstances avez-vous haussé le ton, fait flamber le torchon au point que votre culpabilité vous ait assailli(e) plusieurs heures ou même plusieurs jours ? 

Tout le monde sait que nos sautes d’humeur ne sont jamais que la preuve d’une insatisfaction latente de soi sur fond de mauvaise conscience. Il existe toutefois un moyen simple pour ne plus attirer « le maniaco-dépressif de service » qui décuplera notre agilité pathologique à trouver plus négatif que soi…

Vous est-il arrivé de fuir une connaissance qui profite de chaque occasion pour (vous) parler de ses soucis ou autres problèmes ? Je pense que vous n’aurez aucune difficulté à retrouver ce type de mauvais souvenirs. L’ennui c’est que ces gens-là nous parasitent au point que, de retour chez soi, non seulement nous nous plaignons de l’interlocuteur négatif, croisé au « hasard » d’une rue ou d’un magasin, mais qu’en parallèle nous embrayons à l’identique, écrasant doublement notre « moitié ».

Pour ne plus véhiculer le malheur des autres – qui n’est jamais que le vôtre camouflé dans l’inconscient, – obligez-vous à une maîtrise basique. Votre duo prendra une tournure autrement plus intéressante : il vivra, il existera sans que le dénigrement tous azimuts soit un prétexte pour faire semblant de bien vous entendre et d’admirablement vous comprendre.

Travaux pratiques n° 3 : Élevez vos pensées !

  • Dès le lever, quelle que soit l’heure, imposez-vous de louer toutes les grâces que la vie vous donne. Fâchez-vous contre vous-même si parviennent à votre conscience les quelques «  crasses » que vous croyez que l’existence vous fait, vous ordonne et vous impose. Celles-ci perdront vite du terrain et laisseront de plus en plus la place à de belles vibrations d’enthousiasme, de joie, de bonheur, de réconciliation, d’amour. 

Tous ceux qui pensent que ces conseils sont ridicules devraient essayer. J’ai moi-même beaucoup traîné les pieds avant d’écouter une psychothérapeute amie qui, avec beaucoup de patience, il y a plusieurs décennies de cela, m’avait expliqué combien vibrer positif transforme l’existence avec succès. Il a malheureusement fallu que je traverse une grande période de soucis pour me dire que je ne risquais rien d’essayer une méthode aussi « banale »… Quel manque d’humilité de ma part ! Avec le recul, je me pardonne en rationalisant : j’étais très jeune et oscillais à l’époque entre complexe du sauveur et mauvais doutes. Les choses se seraient probablement aggravées si je n’avais finalement pas accepté de saisir l’étonnante perche qui m’était tendue depuis longtemps !

Les couples qui durent ne sont pas imbus de leur personne. Peut-être croit-on le contraire si on les observe du coin de l’œil. À l’inverse, dès qu’on décide de les prendre comme source d’apprentissage, de croire en leur capacité remarquable à s’aimer et à aimer, un grand pas vers la beauté de l’alliance amoureuse est franchi.

Ces femmes et ces hommes enviables – au noble sens du terme – ne se prennent pas la tête ! Ils sont directs, francs, sans jamais chercher à s’inventer un profil aux antipodes de ce qu’ils ont à vivre.

· Florence est mariée depuis 22 ans avec Serge. Ils n’ont pas pu avoir d’enfant, ce qui n’est pas l’idéal pour prendre le temps de la réflexion en cas de crise. Effectivement, nos réflexes parentaux font que si il y a désaccords importants, nous cherchons instinctivement une solution pour ne pas imposer à nos « petits » les difficultés liées à un divorce ou à une séparation. Écoutons le témoignage d’autant plus précieux de Florence :

Chaque fois qu’avec Serge, ça ne va pas, je lui en parle. Il apprécie de son côté que nous désamorcions tout de suite la bombe qui pourrait être à retardement. La bonne manière à adopter se résume à parler à la première personne du singulier. Ainsi, nous bannissons systématiquement le « tu » suivi d’un reproche dirigé contre l’autre…

Florence a tout à fait raison. Lorsqu’une attitude de votre partenaire vous blesse, vous fait souffrir, vous vous devez de le lui dire, en induisant bien que votre cœur, votre tête et votre corps ont mal. Un dialogue juste s’instaurera qui permettra à chacun de connaître, de comprendre, de sentir, les limites supportables (pour lui ou pour elle).

Travaux pratiques n° 4 : Soyez vous-même !

  • Que ne lui avez-vous pas encore dit qui vous fait souffrir dans ce qu’il (ou elle) fait ou ne fait pas ?
  • Notez soigneusement toutes ces tracasseries et contrariétés. Elles se représenteront, soyez-en assuré(e) ! C’est alors qu’il faudra vous armer de courage pour lui indiquer combien vous êtes triste. Toutefois, la gêne du début disparaîtra sans même que vous vous en rendiez compte.

Si, véritablement, vous n’arrivez pas à formuler ce qui vous agresse dans ses comportements, il suffit de prendre l’habitude de vous détendre au préalable. D’ailleurs, c’est une sagesse supplémentaire qui évite de démarrer au quart de tour.

Tout d’abord, observez-vous. Vous imaginez ce moment tant attendu où vous allez enfin lui expliquer que non seulement vous ne souriez plus depuis qu’il vante les mérites de son associée (c’est un exemple) ou que vous êtes inquiet depuis qu’elle fait du bénévolat et rentre après minuit (c’est un autre exemple). Regardez-vous faire : vous mordillez nerveusement votre stylo, vous tournez en rond, vous en êtes à la consommation de la moitié de la boîte de biscuits (alors que vous êtes au régime !), vous transpirez, vous « tricotez » vos cheveux… Mais dans quel état votre «bourreau» adoré va-t-il vous trouver en rentrant ?

Pour que le calme revienne, avant son retour, connectez-vous sur les ondes de la confiance. Vous avez des tas d’outils à disposition. Ici aussi vous pouvez piocher dans le quotidien. Même la télé peut faire l’affaire : un bon documentaire, un dessin animé. Ou un passage des Écritures Saintes, l’album photos de votre mariage, celui de votre plus joli voyage, un magazine people… Vous quitterez ainsi vos mauvaises énergies en détournant votre attention partisane. Pour que votre esprit ne vagabonde plus vers des contrées arides et hostiles, rappelez-vous toujours que ces idées d’apaisement ont un but thérapeutique.

Travaux pratiques n° 5 : Guérissez de vos craintes !

  • Ne différez pas votre décision saine de vouloir lui parler de vos incompréhensions. Si la peur vous inhibe, considérez qu’en vous relaxant, vous préparez déjà la guérison de votre couple. Cette sorte de vaccination systématique vous habitue à prendre soin de votre relation qui, à force de se refaire une santé, sentira bon la force et la solidité.

De toute façon, l’échec n’existe pas. C’est une pure invention masochiste. Un couple qui se fait confiance pour la vie le sait : il ne se pose pas la question de la réussite. Non pas qu’il soit inconscient, comme l’oiseau sur la branche, mais parce que sa philosophie s’étaye sur un postulat de vie immuable : le oui.

À l’inverse, qu’y a-t-il de si difficile ou d’impossible à voir l’Univers, le monde, ses occupants, les autres, l’autre, auréolés de cette qualité primordiale d’acceptation ? Pour la majeure partie des terriens, le refus alimente systématiquement le flux oral, excluant la plus petite possibilité de partage. Cette dramatique erreur a des retentissements discriminatoires majeurs, qui cisaillent en particulier l’amour. S’il apparaît compréhensible qu’un minimum de méfiance soit au début d’une aventure amoureuse, il s’avère moins logique qu’un chemin parcouru à deux, depuis un temps long, connaisse la rupture. Cependant, il faut bien garder à l’esprit que nos mécanismes de défense (dont la suspicion) puisent leurs convictions dans un négativisme ambiant qui remonte au propre négativisme de notre généalogie.

Malgré tout, si nos pensées immatures étaient structuralement sous influence lors de notre démarrage dans l’existence, nous pouvons changer ce schéma psychique. Il importe dès lors, de bien intégrer deux éléments :

  • le oui est un sésame
  • le oui appelle quelques sacrifices.

Cette ambivalence, non contradictoire, explique en partie pourquoi nous persistons à imaginer que tout interlocuteur va répondre par la négation à nos sollicitations. Établir des liens dans ces conditions amène à faire les questions et les réponses ! Cette conscience erronée que nous avons de l’autre conduit à franchir la ligne blanche, écartant d’ores et déjà tout bon fonctionnement. Chacun jouera sa propre partition. Le couple ne s’appellera plus mélodie mais cacophonie, parfois même insonore ! Dommage car une « conjugalité » durable saisit le sens de cette opposition apparente entre acceptation (le oui) et les sacrifices adjacents.

· Valériane ne s’entendait pas du tout avec ses beaux-parents. Peu intéressants, selon ses affirmations, elle n’avait jamais établi de contacts chaleureux avec eux. Très âgés maintenant, leur vie dans leur mas devenait difficile. Elle savait bien que Simon-Pierre, son mari, avait le désir que ses parents quittent leur habitation pour venir occuper une maison de gardien située sur la propriété du jeune couple mais elle n’était pas d’accord et n’en avait pas envie… En assistant à une homélie dans laquelle le prêtre parlait de réconciliation, elle s’engagea (devant Dieu et les siens) à accueillir  les deux personnes en fin de vie :

– Je n’ai pas eu à le regretter. Le seul sacrifice que j’ai fait a été de reconnaître pourquoi j’avais autant résisté : je gardais au fond de moi un très mauvais souvenir de mes grands-parents paternels, alcooliques qui, jusqu’à leur mort, se sont insultés… En revanche, une fois sortie de cette confusion, j’ai découvert la véritable richesse de mes beaux-parents : bouddhistes accomplis, ils m’ont permis d’élargir ma spiritualité. Nos conversations sont passionnantes. Elles ont fortifié mon union maritale…

Le oui produit des effets magiques. J’ose employer ce terme car l’acceptation sincère, non séductrice, le vérifie sans aucune exception. Accepter ses beaux-parents, c’est aussi respecter son partenaire. Bien sûr, ceux-ci peuvent être des gens odieux (ça existe) mais le conjoint n’y est pour rien. Il est possible déjà d’accepter sa belle-famille, aussi difficile soit-elle, en ne la critiquant pas, quelles que soient ses failles, combien même ne la fréquenteriez-vous pas. Cette acceptation muette offre l’opportunité à l’autre membre du couple de faire le point quant aux sentiments filiaux qu’il nourrit  ou qu’il dénie à tort. Votre silence l’éclairera au nom de l’amour qu’il vous porte, sans que la haine en profite pour le pervertir.

Ainsi et aussi contrariant pour vous que soit la demande formulée par votre partenaire, si cette requête est objectivement correcte, acceptez : vous n’avez rien à craindre. L’inconscient fonctionne de façon protectrice si nous choisissons d’accéder au désir légitime de notre amoureux. Entendez par-là que si ce désir risque d’être un facteur déstabilisant ou même dégradant, la situation se diluera d’elle-même ou ne se concrétisera pas !

Travaux pratiques n° 6 : Dites oui !

  • Pensez à la Vierge Marie qui nous a conseillés, en faisant allusion au Christ : Fais tout ce qu’Il dira !

Une fois ce tout analysé comme raisonnable et réalisable humainement, compte tenu aussi de l’équilibre de votre union, dites oui, sans rien attendre d’autre que la… paix !

 

 

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