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A lire : les livres et quelques articles
de Chantal Calatayud,
psychanalyste, didacticienne analytique,
auteur,
parus dans Psychanalyse magazine.

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Découvrez gratuitement ici
la version en ligne ou numérique téléchargeable
du livre de Chantal Calatayud

" 55 minutes avec Freud "

Editions Villon
Collection " Vivre heureux tout simplement... "

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La psychanalyse pourrait se résumer à envisager cette technique comme permettant de régler toutes les catégories de névrose d’échec. C’est-à-dire dépasser les résistances inconscientes, celles qui empêchent l’être humain d’exister fondamentalement et de se réaliser. Cependant, la pratique de la méthode freudienne est moins simpliste qu’il n’y paraît ou que certains ne l’imaginent...


S'appuyant sur une méthode et une méthodologie rigoureuses, Chantal Calatayud restitue avec précision et professionnalisme, à l'aide d'un cas clinique précis, ce qui se joue et se dénoue dans le transfert et l'espace/temps de la cure psychanalytique.

 

 

 

 

Anamnèse

 

L’anamnèse est un recueil d’informations auquel procède le psychanalyste lors de l’entretien préliminaire, en règle générale, informations données par le patient et qui seront précieuses dans le déroulement de la cure.

Lucie, âgée de 36 ans, vient en consultation pour des insomnies résistantes depuis le décès de sa fille, Marine, 18 mois, qui a succombé à une cardiopathie il y a un an. Ses insomnies s’accompagnent d’angoisses nocturnes mais elle décrit également un tableau anxieux dans la journée, notamment au moment des repas. Elle m’est adressée par son médecin-traitant.

Sa filiation

– La mère de Lucie, Jacqueline, est issue d’un couple de bon niveau social : son père était proviseur dans un lycée des Bouches-du-Rhône, sa mère a élevé 5 enfants, le couple s’entend bien malgré une infidélité légendaire du père (infidélité n’ayant plus cours aujourd’hui). Jacqueline a fait une fausse couche à 42 ans.

– Le père de Lucie, Jean-Guy, né dans une famille d’agriculteurs corréziens de plusieurs générations, a revêtu le statut de fils unique et l’est resté. Jean-Guy a pourtant eu une sœur aînée de 3 ans, Michelle, décédée d’une malformation cardiaque inopérable à l’époque. Sa mère ne s’en serait jamais complètement remise.

Son couple

Lucie est mariée depuis 10 ans avec Pierre. Tous deux avaient décidé, d’un commun accord, de ne mettre une grossesse en route qu’une fois qu’ils habiteraient leur villa en projet de construction. Ce qui explique que Marine ne soit arrivée dans le foyer qu’un peu plus de 7 ans après l’union officielle. Le couple n’envisage plus d’avoir d’enfant, redoutant un nouveau décès.

Sa vie professionnelle

Lucie est infirmière libérale comme son mari. Elle dit avoir réellement choisi ce métier, alors que ses parents auraient aimé qu’elle soit enseignante. La médecine l’attirait mais elle a toujours su qu’elle n’avait pas le niveau intellectuel, ajoute-t-elle. Professionnellement, tout va pour le mieux. Mais Lucie semble avoir moins d’enthousiasme auprès de ses patients depuis la mort de son enfant, en particulier lorsqu’il s’agit de pratiquer des soins à de jeunes malades de sexe féminin.

Sa vie sociale

Lucie est plutôt casanière, ce qui convient tout à fait à Pierre. En revanche, elle fait de l’escalade dans un club proche de son domicile. Il lui arrive souvent d’avoir peur mais elle continue tout de même. Depuis le décès de sa fille, Lucie est toutefois moins assidue. En ce qui concerne ses amitiés, Lucie n’a confiance qu’en une seule personne : Virginie, sa meilleure amie depuis le CP. Celle-ci est institutrice et célibataire et habite maintenant Paris.

Ses antécédents médicaux

Lucie a été opérée d'une hernie inguinale droite à l'âge de 6 ans. Elle a connu un épisode anorexique vers 16 ans qui a duré jusqu'à sa majorité.


Ses antécédents médicaux filiaux

- La mère de Lucie a été opérée d’un cancer du sein à 56 ans.

- Le père de Lucie est robuste.

- Aucune information médicale autre n’est livrée.


Ses liens affectifs

Lucie s’entend bien avec ses parents mais à la condition de ne pas les voir trop souvent. Son mari et elle-même déjeunent un dimanche par mois avec eux et chez eux. Le décès de Marine n’a en rien changé cette habitude. Le couple fait à l’identique avec les deux autres parents quinze jours plus tard, chaque mois également. Les repas dominicaux restants sont l’occasion de se préparer un plateau-repas à la maison, pris en tête à tête.


Observation

Une synthèse des éléments fournis par Lucie permet de poser le problème de la façon suivante, après l’avoir articulé au symptôme :

> Dans les deux filiations, on constate que le genre féminin connaît soit des décès par maladie, soit des maladies graves ou des interruptions de grossesse. L’homme, en revanche, est solide.

• Décès de Marine : cardiopathie

• Décès de Michelle : malformation cardiaque

• Hernie inguinale de Lucie

• Épisode anorexique de Lucie

• Fausse couche de Jacqueline

• RAS chez les sujets de genre masculin.

> En recherchant un lien entre les manifestations somatiques féminines, leur objectivation met en exergue :

– un sein nourricier défaillant (cancer du sein et anorexie)

– un affect de mauvaise mère (fausse couche), renforcé par la hernie inguinale qui est une extériorisation du sac herniaire (ne parle-t-on pas de sac ovulaire ?) proche de l’aine (la haine ?), donc de l’appareil génital

– un affectif délicat (cardiopathie touchant le cœur, organe ambivalent donnant lieu à une possibilité de l’envisager comme le symbole de l’amour mais organe, dans ce cas, qui ne « bat pas correctement »).

> L’analyse se concentre :

a) sur une identification névrotique à un fantasme compulsif de mères peu fiables, fantasme ancré dans le transgénérationnel et qui donc se répète comme une « fidélité » à la filiation, tel un code d’appartenance funeste qui a poussé l’inconscient de Lucie à rencontrer un futur mari qui présente à peu près le même symptôme. Ce type d’événement, fréquemment vérifié, a fait dire à Sigmund Freud que les névroses s’attirent et se complètent selon un scénario immuable tant qu’on n’en prend pas conscience…

b) sur une culpabilité refoulée qui pousse l’inconscient de Lucie à se réveiller la nuit (comme sa petite fille pourrait la réveiller si elle était encore en vie) et à être anxieuse au moment des repas (comme pour Marine qui aurait pu connaître des troubles de l’alimentation).


> L’analyse conclut à une confusion identitaire majeure chez Lucie.


Chapitre 3 - Face-à-face

 

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